Table des matières
Partie 1. Sieger Köder : une découverte, une démarche
Partie 2. Le Chemin de croix, selon Sieger Köder
- Jésus est condamné à mort
- Jésus est chargé de sa croix
- Jésus tombe pour la première fois
- Jésus rencontre sa mère
- Simon de Cyrène aide Jésus à porter sa croix
- Véronique essuie le visage de Jésus
- Jésus tombe pour la deuxième fois
- Jésus rencontre les femmes de Jérusalem
- Jésus tombe pour la troisième fois
- Jésus est dépouillé de ses vêtements
- Jésus est cloué sur la croix
- Jésus meurt sur la croix
- a) Jésus est détaché de la croix…
b) … et son corps est rendu à sa mère - Le corps de Jésus est mis au tombeau
Le Chemin de croix, selon Sieger Köder
3. Jésus tombe pour la première fois
Voici la première des trois stations du Chemin de croix consacrées aux chutes de Jésus (trois, chiffre de la Trinité). Celles-ci proviennent de la tradition populaire, car ni les Évangiles ni les apocryphes ne mentionnent de chute de Jésus sur le chemin du Golgotha. Que celui-ci soit tombé sous sa charge paraît néanmoins vraisemblable.
« Les condamnés devaient porter eux-mêmes la poutre transversale de la croix jusqu’au lieu de l’exécution où se trouvait plantée la poutre verticale » (TOB, Jn 19, 17, note s, p. 1507). Cette poutre verticale s’appelait stipes (stauros, selon le Nouveau Testament). « Les condamnés […] portaient [la poutre transversale, ou patibulum] en travers des épaules, les avant-bras attachés au bois par des cordes. [Le patibulum] pesait de 37 à 75 kilos selon les dimensions et le bois utilisé, fardeau écrasant pour un homme. Jésus a donc vraisemblablement été chargé du patibulum et non de la croix entière lors de la montée du Golgotha. »
(Wikipédia, https://fr.wikipedia.org/wiki/Patibulum)
On savait que la résistance de la chair ne vaut pas celle du bois, mais on ignorait que la tendreté de cette chair-ci se distinguerait de celle des durs à cuire par la tendresse qu’elle abritait. À ce stade-ci, le Fils de l’Homme (pour ne pas dire « de Dieu ») est déjà si faible, jugent les soldats, qu’il n’ira bientôt pas plus loin sans aide. Comme ils n’ont pas de temps à perdre, ils réquisitionneront un passant (v. cinquième station), Simon de Cyrène, pour transporter le fardeau à sa place (Lc 23, 26), ce qu’attestent les trois synoptiques (Mt 27, 32; Mc 15, 21; Lc 23, 26).
Source : https://www.alamyimages.fr/jesus-tombe-la-premiere-fois-3eme-stations-de-la-croix-par-sieger-koder-dans-l-eglise-saint-etienne-a-wasseralfingen-allemagne-image350577840.html
Dans la troisième station du Chemin de croix — Jésus tombe pour la première fois —, Sieger Köder oppose les tons froids aux tons chauds. Le ciel du condamné est lourd et encombré de fantômes. C’est le poids qu’un seul soutient, nouvel Atlas. À ce rappel antique se superpose la croix que forment ensemble la poutre et le bras tendu, croisement appelé à devenir un signe pour les chrétiens.
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Très affaibli par le manque de sommeil, les événements stressants des dernières heures (Cène, prière d’angoisse à Gethsémani, arrestation, interrogatoires, sentence de mort) et la brutalité de la flagellation — non seulement douloureuse mais épuisante —, le « Fils de l’Homme » (Mt 9, 6) ne devait plus être de taille, physiquement, à soutenir le poids d’une poutre monstrueusement robuste comme celle que Sieger Köder a représentée ici, équarrie avec précision. Est-il nécessaire de rappeler que Jésus étonnera Pilate par sa mort hâtive (Mc 15, 44), qui le désignera comme le plus faible des hommes?
Traversé par la poutre, le tableau de Sieger Köder divise celui-ci en deux surfaces égales : en haut, le côté sombre de l’expérience humaine, en bas, le travail du Rédempteur, nouvel Atlas qui porte les péchés du monde. En haut, quelques figures unies dans le même bleu nuit : un condamné qui en appelle de son sort, poignets liés derrière le dos; un personnage anonyme qui tient une coupe rappelant celle que Jésus demandait à son père d’éloigner (Mt 26, 39); une femme, enfin, abusée, assommée ou morte entre les mains de l’homme qui la domine. Presque au centre, la tête sévère d’un juge moderne (il porte des lunettes); il siège derrière la poutre qui lui sert de pupitre; sa toge rouge descend vers le prévenu : pareille à un jugement, elle enveloppe le corps de Jésus, mis à genoux, en descendant le long de son bras droit, tendu comme une béquille, sur lequel repose l’édifice du châtiment. En descendant vers le condamné, le rouge grenat de la justice se clarifie; il devient rouge sang.
Le bois écrase la nuque de Jésus; sa tête fléchit vers le bas; son profil simplifié se résume à un nez droit qui part du front. Son œil se trouve au tiers inférieur de l’image; il remontera au centre, à la cinquième station, quand Simon de Cyrène viendra l’épauler.
Ramassé sur lui-même, Jésus profite d’une sorte d’équilibre momentané durant lequel sa main droite, ancrée au sol, libère la gauche, qui s’accroche à la poutre, reliant ainsi la terre des Hommes à l’instrument de leur Salut.
À en juger par la pente à contre-jour derrière lui, Jésus se trouve bien sur un chemin ascendant, celui du Golgotha, tandis que la solive, elle, tend vers le bas. Sieger Köder a représenté symétriquement la colline et la poutre dans un angle obtus dont le sommet intercepte l’épaule de Jésus. On remarque alors que les couleurs pâles du bras et du bois dessinent ensemble la silhouette d’une croix. Ce n’est pas un hasard si le pan de la coiffe du juge, qui apparaît presque en prolongement du bras, vient renforcer l’idée de croix. La figure du magistrat se confond ainsi en quelque sorte avec l’écriteau (appelé titulus) que Pilate fera placer au-dessus de la tête du condamné et sur lequel on pourra lire en trois langues : « Jésus le Nazôréen, le roi des Juifs. » (Jn 19, 19-20)
Ne manquez pas la suite :
4. Jésus rencontre sa mère
Texte : © André-Guy Robert, 2022
Tableaux : © Sieger Köder et ayants droit
Photos : © Sources respectives, Internet
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