« Le cri des méduses » ou le langage de l’indicible

Article écrit pour la section « La littérature est partout »
de la revue d’arts littéraires
Entrevous.

 

  • Spectacle vu au Théâtre des Muses de la Maison des arts de Laval le 29 octobre 2019.
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Le Radeau de La Méduse du peintre Géricault [1791-1824] conservé au musée du Louvre, à Paris.
Il s’agit du tableau qui a inspiré Alan Lake pour sa chorégraphie
Le cri des méduses.
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Le cri des méduses du chorégraphe Alan Lake. Photo Antoine Caron.

La conversion de tableaux en danse, en musique ou en texte pose d’emblée la question du temps. La peinture donne à voir instantanément la totalité d’une image tandis que la danse, la musique ou le texte, qui se dévident en instants successifs, ne révèlent la totalité de leur sens qu’après coup.

En 2019, j’aurai couvert deux spectacles de danse contemporaine inspirés par des tableaux célèbres. Après Le Jardin des délices de Bosch-Chouinard (Entrevous 11, p. 48 à 51), voici Le Radeau de La Méduse / Le cri des méduses de Géricault-Lake.

À l’exemple de Baudelaire traduisant Poe, Alan Lake et Marie Chouinard ont produit de « belles infidèles », car ce qui intéresse manifestement ces chorégraphes est exactement ce qui intéressait aussi le traducteur : poursuivre une recherche personnelle, abstraite et subconsciente.

Alan Lake dispose d’une troupe qui défend sa recherche corps et âme. Ses neuf danseurs et danseuses (dont l’une visiblement enceinte) ne ménagent aucun effort pour incarner sa vision, tout en poursuivant pour leur compte une exploration kinesthésique tantôt individuelle tantôt collective. D’où leur motivation!

Si je vois juste, chacun cherche son chat. Ainsi, de belle infidèle en belle infidèle, les artistes tentent d’attester à leur façon ce qu’ils devinent et qui les transcende : le peintre Géricault avec ses couleurs, le chorégraphe Lake avec sa vision cinétique des corps, les interprètes avec leur méditation musculaire, l’écrivain — moi, en l’occurrence — avec les mots du non-dit. Tous, nous tentons d’exprimer l’indicible qui, dans la couleur, le mouvement, la sensation, les mots… se dérobe.

Dans la mer de bruits dont notre quotidien raffole, des artistes aux oreilles fines captent et traduisent en signaux pour malentendants l’appel irrésistible d’intuitions flottantes.

Cet appel, c’est peut-être cela, « le cri des méduses ».

 

                                                     Laval, du 30 octobre au 26 novembre 2019.

 

© André-Guy Robert, 2019, 2020
Toute reproduction sans l’autorisation préalable de l’auteur est interdite.
Demande d’autorisation : andreguyrobert@hotmail.com

 

Article publié dans :

Entrevous, revue d’arts littéraires,
numéro 12, section « La littérature est partout »,
sous-section « Danse et beaux-arts : un acte poétique »,
Société littéraire de Laval, Laval, février 2020, 60 p. [p. 59];
Entrevous est une revue numérique en ligne.
http://sll-entrevous.org/revue-entrevous/numeros/
Permis de reproduire accordé par l’éditeur.

L’auteur a donné une introduction verbale de ce texte
devant les personnes réunies à la bibliothèque Multiculturelle de Laval
pour le lancement du numéro 12 d’Entrevous le lundi 13 janvier 2020.

 

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Version publiée

 

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